Rédacteur Bonnard Lawson

Les lois de finances pour 2018 et 2nde loi de finances rectificative pour 2017 ont été publiées au journal officiel le 29 et 31 décembre 2017 derniers

Nous présentons ci-après les principales mesures à caractère fiscal, patrimonial et social adoptées

LOI DE FINANCES POUR 2018

Définitivement adoptée le 21 décembre 2017, la loi de finances pour 2018 a été publiée au Journal officiel du 31 décembre 2017 (Loi 2017-1837 du 30-12-2017). Elle prévoit la mise en place de plusieurs des réformes fiscales dont notamment la création d’un impôt sur la fortune immobilière, l’application d’une « flat tax », et le renforcement de certaines sanctions fiscales et pénales.

Impôt sur la fortune immobilière (IFI)

A compter de 2018, est institué l’impôt sur la fortune immobilière, dû lorsque la valeur de l’ensemble des biens et droits immobiliers appartenant au contribuable personne physique (et à ses enfants mineurs lorsqu’il a l’administration légale des biens de ces derniers), est supérieure à 1,300,000 €. L’IFI remplace l’ancien ISF, définitivement supprimé.

L’assiette de l’IFI est constituée par la valeur nette, au 1er janvier de l’année d’imposition, de l’ensemble des actifs immobiliers non affectés à l’activité professionnelle du redevable, détenus directe ou indirectement, y compris lorsqu’ils sont détenus via un contrat d’assurance-vie.

Ainsi, entrent dans le champ d’application de l’IFI les titres de sociétés ou d’organismes détenus par le redevable, à hauteur de leur fraction représentative de biens immobiliers détenus directe ou indirectement, et quel que soit le nombre de niveaux d’interposition par la société ou l’organisme (en cas de chaîne de participations, le ratio immobilier applicable à chaque niveau doit être calculé en commençant par le niveau le plus bas).

L’IFI concerne l’ensemble de titres de sociétés (non seulement les sociétés à prépondérance immobilière), cotés ou non, quel que soit la forme sociale, le régime fiscal et le lieu d’établissement de la société émettrice. Sont également imposables les droits détenus dans des organismes de placement collectif.

Biens professionnels

L’immobilier affecté à l’activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale de la société qui les détient est exclu de l’assiette de l’IFI.

Toutefois, même si la location directe ou indirecte de locaux d’habitation meublés est considérée comme une activité commerciale par le CGI (art. 35, I-5° bis), le nouvel IFI exclut expressément l’activité de « gestion de son propre patrimoine immobilier » par une société ou organisme. Il convient donc désormais d’inclure la valeur des immeubles donnés en location meublée pour déterminer valeur imposable des titres de sociétés qui les détiennent. Aussi, cette exclusion a des conséquences pour l’exonération des participations minoritaires (voir ci- dessous) qui entrent bien dans le champ de l’IFI du moment où la société a pour activité la location meublée.

Cependant, le redevable qui détient des immeubles d’habitation donnés en location meublée bénéficie de l’exonération à condition que lesdits immeubles constituent pour lui des biens professionnels, soit, lorsque celui-ci réalise plus de 23 000 € de recettes annuelles et retire de cette activité plus de 50 % des revenus professionnels imposables de son foyer fiscal.

Participations minoritaires

Sont exclues les participations de moins de 10% détenues directe ou indirectement (par le redevable et par les membres de son foyer fiscal) dans des sociétés opérationnelles. Ces participations ne sont donc pas prises en compte pour le calcul du ratio immobilier susmentionné (chaîne de participations).

Participation dans SIIC et OPC

Les parts de SIIC (détenues par le redevable et par son foyer fiscal) représentant moins de 5% du capital et des droits de vote échappent à l’IFI. Les non-résidents, exonérés jusqu’alors, deviennent désormais imposables à l’IFI à raison de leurs parts de SIIC dépassant le seuil d’exonération.

Les parts représentant moins de 10 % des droits d’un fonds d’investissement ou d’un organisme de placement collectif (détenues par le redevable et par son foyer fiscal) échappent également à l’IFI, à condition que l’organisme détienne directe ou indirectement moins de 20% de son actif en biens et droits immobiliers imposables à l’IFI.

Passif déductible

Les règles d’évaluation du passif déductible ont été aménagées afin de les adapter à la nouvelle assiette. Ainsi, sont déductibles les dettes existantes au 1er janvier de l’année d’imposition, afférentes à des actifs imposables, contractées et acquittées par le redevable (ou les membres de son foyer fiscal) ou par la société dans laquelle il détient des titres. La loi fixe désormais une liste des dettes déductibles (dépenses d’acquisition, de réparation, d’entretien, d’amélioration, etc.) afférentes aux biens imposables.

Les emprunts bancaires, les sommes restant dues aux prestataires de services ou aux entrepreneurs de travaux ainsi que le capital constitutif de la rente viagère en cas d’acquisition moyennant le paiement d’une rente viagère restent déductibles.

S’agissant des impôts, restent déductibles uniquement ceux liés à la propriété des biens (taxes foncières, taxe sur les locaux vacants, la taxe sur les bureaux en Ile- de-France et l’IFI lui-même). Ne sont plus déductibles les impôts liés à l’occupation (taxe d’habitation) ni aux revenus générés par les biens (revenus fonciers, BIC, prélèvements sociaux).

Les redevables qui ont acquis un immeuble par suite d’une donation ou d’une succession devraient pouvoir également déduire les droits de donation ou de succession en instance de paiement au 1er janvier.

Les prêts « in fine » contractés pour l’acquisition d’un bien imposable ne sont déductibles qu’à hauteur d’annuités théoriques calculées en divisant le montant de l’emprunt par le nombre d’années total de l’emprunt ; la somme des annuités restant à courir jusqu’à l’échéance est déductible.

Ne sont pas déductibles les prêts contractés directement ou indirectement auprès du redevable ou d’un membre de son foyer fiscal.

Sont également non-déductibles les prêts contractés directement ou indirectement auprès d’un membre du groupe familial du redevable ainsi que ceux contractés par le redevable ou un membre de son foyer fiscal auprès d’une société contrôlée, à moins que le redevable justifie du caractère normal des conditions du prêt (respect des échéances, montant, caractère effectif des remboursements), auquel cas il échappe à la notion de dette abusive et peut donc déduire les dettes correspondantes.

Plafond de déduction

Lorsque le patrimoine taxable est supérieur à 5 millions d’euros et que le montant des dettes excède 60% de cette valeur, la fraction des dettes excédant cette limite n’est déductible qu’à hauteur de 50% de cet excédent.

Ce plafonnement n’est pas applicable si le redevable justifie que les dettes n’ont pas été contractées dans un objectif principalement fiscal.

Il est précisé que le barème, l’abattement de 30 % sur la valeur de la résidence principale, ainsi que les dispositions en faveur des impatriés sont maintenus par rapport aux règles applicables en matière d’ISF.

En outre, la réduction d’impôt au titre des dons au profit de certains organismes d’intérêt général est conservée, de même que le dispositif de plafonnement. Les régimes d’exonération applicables dans le cadre de l’ISF aux bois et forêts et parts de groupements forestiers ou fonciers sont également maintenus.

Prélèvement forfaitaire unique (PFU)

Le régime de taxation des revenus et gains du capital perçus par les personnes physiques est réformé par la mise en place d’un prélèvement forfaitaire unique (PFU). Entrée en vigueur au 1er janvier 2018, ce prélèvement, aussi appelé « flat tax », consiste en une imposition au taux unique de 12,8 % auquel s’ajoutent les prélèvements sociaux de 17,2 %, ce qui se traduit par une taxation globale à 30 %. Les contribuables ont la possibilité d’opter pour le barème progressif s’ils y ont intérêt.

Le champ d’application du PFU concerne notamment:

  • les produits d’actions et de parts sociales (dividendes) et, de manière plus générale, l’ensemble des revenus distribués, y compris les revenus réputés distribués ;
  • les jetons de présence et autres rémunérations alloués aux membres du conseil d’administration ou du conseil de surveillance des sociétés anonymes ;
  • l’ensemble des produits de placement à revenu fixe;
  • les sommes réparties par les fonds communs de placement et les revenus d’actifs mobiliers des fonds de placement immobilier ;
  • les produits résultant de la première cession d’usufruit temporaire qui se rattachent à la catégorie des revenus mobiliers ;
  • les plus-values et créances relevant de l’Exit Tax, pour les personnes qui transfèrent leur domicile hors de France à compter du 1er janvier 2018.

Renforcement de certaines sanctions fiscales et pénales

Sanction de l’opposition au droit de communication

L’amende prévue par l’article 1734 du CGI en cas de refus de communication des documents ou renseignements demandés par l’administration, ou en cas de comportement faisant obstacle à cette communication, est portée, à compter du 1er janvier 2019, de 5 000 € à 10 000 €.

L’amende qui sanctionne les manquements au droit dont dispose l’administration de demander aux éditeurs et concepteurs de logiciels de comptabilité, de gestion ou de système de caisse tous codes, données, traitements ou documentation qui s’y rattachent, est portée de 1 500 € à 10 000 €.

Sanction de la fraude fiscale aggravée

L’amende prévue par l’article 1734 du CGI qui sanctionne la fraude fiscale aggravée (faits visant à éluder l’impôt par l’usage de contrats ou de comptes étrangers, l’interposition de personnes physiques ou d’entités étrangères, l’usage de faux, de domiciliation fictive à l’étranger, l’interposition d’entité fictive ou artificielle et de toute autre manœuvre destinée à égarer l’administration) est portée de 2,000,000€ à 3,000,000€ (la peine d’emprisonnement reste fixée à 7 ans).

Le prononcé d’une peine complémentaire de privation de l’ensemble des droits civiques, civils et de famille est rendu obligatoire, avec possibilité pour le juge de ne pas prononcer cette peine par une décision spécialement motivée.

Droit de communication créé dans le cadre de la lutte de l’UE contre le blanchiment des capitaux

Il est créé un nouvel article (L 88 LPF, en vigueur au 1er janvier 2018) qui permet à l’administration fiscale d’exercer un droit de communication auprès des institutions financières, avocats, huissiers, notaires, conseillers en investissements financiers ou autres, experts comptables, casinos, cercles de jeux, etc. des documents et informations qu’elles détiennent dans le cadre de leurs obligations de vigilance en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Il sera sanctionné par l’amende prévue à l’article 1734 du CGI susmentionné.

Cette mesure vise la mise en conformité de l’administration fiscale à la directive européenne 2016/2258/UE qui prévoit que les autorités fiscales des Etats membres doivent disposer d’un accès aux informations, procédures, documents et mécanismes relatifs à la lutte contre le blanchiment, afin de pouvoir échanger des renseignements dans le cadre de la coopération fiscale avec les autres administrations européennes.

Diminution progressive du prélèvement sur les profits immobiliers des non-résidents

Les profits immobiliers habituels réalisés en France par des personnes physiques ou morales domiciliées ou établies hors de France sont désormais soumis à un prélèvement dont le taux, jusqu’alors fixé à 331⁄3%, est établi par renvoi au taux normal de l’impôt sur les sociétés.

Il est rappelé que ce taux est, pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019, fixé à 28% pour la fraction de bénéfices n’excédant pas 500 000 € et à 31% au-delà. Pour les exercices ouverts en 2020, 2021 et 2022, le taux sera ramené à 28%, 26,5% et 25% respectivement (pour la totalité de bénéfices de toutes les entreprises).

LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE 2017

La loi de finances rectificative a été, quant à elle, publiée au Journal officiel du 29 décembre 2017, après examen par le Conseil Constitutionnel (Loi 2017- 1775 du 28-12-2017). Elle prévoit notamment des nouvelles obligations en matière d’échange automatique d’informations.

Nouvelles obligations en matière d’échange automatique sur les comptes financiers

La LFR 2017 prévoit une obligation de transmission d’informations « auto-certification » qui consiste, pour les titulaires de comptes, à remettre aux institutions financières (IF) les informations nécessaires à l’identification de leurs résidences fiscales et, le cas échéant, de leurs numéros d’identification fiscale. S’il s’agit d’une entité non financière passive, le titulaire de compte doit également fournir les informations concernant les personnes physiques qui détiennent le contrôle de l’entité. Cette auto-certification s’applique seulement si l’IF est tenue de collecter ces informations, soit :

  • pour les comptes financiers ouverts depuis le 1er janvier 2016,
  • en cas de changement de circonstance remettant en cause la fiabilité ou l’exactitude de l’auto-certification originale.

Le défaut de déclaration par un client qui y est tenu est sanctionné par une amende de 1 500 € applicable à compter du 30 décembre 2017.

Enfin, la Loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, publiée au journal officiel du 31 décembre 2017 prévoit aussi une évolution de l’imposition des plus-values et des revenus fonciers.

En effet, la Contribution sociale généralisée (CSG), prélevée sur certains revenus comme les revenus d’activité (salaires, primes), les revenus de placement (plus-values immobilières, revenus du patrimoine…) etc., est relevée de 1,7 point afin de financer l’allégement sur les prélèvements liés aux revenus d’activité.

Ainsi, le taux global des prélèvements sociaux applicables aux revenus du capital, comprenant la CSG, la CRDS, le prélèvement de solidarité, le prélèvement de social et sa contribution additionnelle, passe ainsi de 15,5 % à 17,2 %.

Cette mesure s’applique aux revenus du patrimoine de l’année 2017, à déclarer en 2018, et les plus-values dont le fait générateur intervient à compter du 1er janvier 2018.

Me Jean-Philippe Mabru